10. Mai 2021
Valeurs hépatiques élevées
Transaminases, cholestases, ictère: comment les interpréter?
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Des élévations des valeurs hépatiques sont diagnostiquées chez des patients dont l’anamnèse et les symptômes suggèrent déjà une maladie du système hépatobiliaire, ou bien elles constituent une découverte inattendue, souvent isolée, chez des patients chez qui des examens de laboratoire ont été effectués pour clarifier des troubles non spécifiques ou dans le cadre d’un bilan de santé. Cette dernière situation se retrouve fréquemment dans la pratique clinique quotidienne et place le médecin face au défi d’initier les investigations supplémentaires correctes chez un patient apparemment en bonne santé.
Cette clarification est particulièrement importante étant donné que de nombreuses hépatopathies chroniques restent longtemps asymptomatiques et peuvent, en l’absence de traitement, déboucher sur une cirrhose du foie ou un carcinome hépatocellulaire. Cet aperçu systématique a pour but d’aider le clinicien à interpréter les élévations des valeurs hépatiques et à sélectionner les étapes diagnostiques ultérieures appropriées.
Aperçu des valeurs hépatiques
En guise d’introduction, un bref récapitulatif des caractéristiques des principales enzymes hépatiques et des paramètres de synthèse hépatiques.
Aminotransférases ALT et AST (= GPT et GOT)
Une lésion aiguë ou chronique des hépatocytes s’accompagne d’une élévation des aminotransférases. L’ALT et l’AST diffèrent par leur demi-vie. Ainsi, la détermination de série combinée peut en dire long sur la dynamique d’un processus. L’alanine aminotransférase (ALT=GPT) se retrouve principalement dans les hépatocytes et constitue donc un marqueur spécifique de lésion hépatocellulaire. Sa demi-vie est de 47 heures. L’aspartate aminotransférase (AST=GOT) est également présente dans d’autres organes que le foie (p.ex. muscle cardiaque, muscles squelettiques, reins, cerveau, pancréas, poumons, leucocytes et érythrocytes). Sa demi-vie, de 16 heures, est nettement plus courte que celle de l’ALT.
Phosphatase alcaline (PA)
La PA est une enzyme qui transporte les métabolites à travers les parois cellulaires. On la trouve principalement dans les parties biliaires du foie et dans l’os, mais également dans le placenta, l’intestin et les leucocytes. Elle est physiologiquement élevée pendant la croissance et la grossesse. Pour différencier une élévation cholestatique d’une élévation osseuse, le dosage de la GGT est utile. Si la GGT est normale et que la phosphatase alcaline est élevée, une genèse osseuse est probable.
Gamma-glutamyltransférase (GGT)
La GGT est une enzyme microsomale et se trouve dans les hépatocytes et les cellules épithéliales biliaires, mais également dans les cellules des tubules rénaux et dans le pancréas. La GGT est inductible par des médicaments (dont les antiépileptiques, les contraceptifs) et l’alcool. La GGT n’est pas un paramètre inflammatoire. Cependant, une augmentation de la GGT est non spécifique et a donc une pertinence limitée en tant que diagnostic isolé de l’abus d’alcool. Une élévation isolée de la GGT ne nécessite pas nécessairement d’examens complémentaires en l’absence de facteurs de risque d’hépatopathie.
Bilirubine
La bilirubine est un produit de la dégradation de l’hémoglobine dans le système réticulo-endothélial. La bilirubine non conjuguée, insoluble dans l’eau, est transportée vers le foie, où elle est conjuguée par l’UDP-glucuronyltransférase et excrétée dans la bile. Une hyperbilirubinémie non conjuguée se retrouve soit dans une surproduction de bilirubine (hémolyse, érythropoïèse inefficace), soit dans une diminution de l’absorption ou de la conjugaison de la bilirubine (maladie de Gilbert, syndrome de Crigler-Najjar, médicamenteuse). Une bilirubinémie conjuguée est généralement un signe d’insuffisance hépatique (augmentation lorsque le foie a perdu plus de 50% de sa capacité d’excrétion) ou d’obstruction biliaire. Une élévation isolée de la bilirubine conjuguée peut suggérer un syndrome de Dubin-Johnson ou de Rotor, deux troubles congénitaux très rares sans valeur pathologique significative.
INR/Quick
Les facteurs de coagulation dépendants de la vitamine K sont produits dans le foie et ont une demi-vie d’environ 2 jours. La valeur INR est donc une mesure de la fonction de synthèse du foie des derniers jours, pour autant que l’absorption de la vitamineK n’ait pas été altérée. Dans les maladies cholestatiques, la valeur INR peut donc uniquement être utilisée de manière fiable comme paramètre de la fonction hépatique après l’administration de vitamineK par voie intraveineuse.
Albumine
L’albumine, qui est également produite par voie hépatique, est une protéine dont la demi-vie est d’environ 3 semaines et qui constitue donc une expression de la fonction hépatique dans les semaines précédant la détermination actuelle de la valeur.
Quand mesurer quelles valeurs hépatiques?
Symptômes généraux
Les symptômes généraux tels que l’abattement, la fatigue et les baisses de performance peuvent suggérer une hépatite aiguë, une hépatopathie ou cirrhose du foie chronique. Dans ce cas, la détermination des transaminases (principalement ALT et PA) et d’un paramètre de synthèse hépatique (INR) est recommandée.
Douleurs abdominales et/ou ictère
Il peut y avoir un problème au niveau des voies biliaires, comme une cholécystite, une cholangite, une cholédocholithiase ou une tumeur. Outre les transaminases, il convient de déterminer les paramètres de cholestase et d’inflammation et de réaliser une échographie abdominale. Si les voies biliaires sont dilatées, une échographie endoscopique, une cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE; extraction de calculs) ou une imagerie avancée (TDM, cholangiopancréatographie par résonance magnétique si la question qui se pose est celle de sténoses des voies biliaires, d’une tumeur) est alors prévue, en fonction du principal diagnostic suspecté.
Tab. 1: Facteurs de risque d’hépatite virale chronique C, B, D
Patients asymptomatiques
Chez les personnes asymptomatiques, il n’existe pas de recommandations générales en vue de la détermination de routine des valeurs hépatiques ayant vocation à servir d’examen de dépistage. Chez les patients présentant un profil de risque pertinent pour une hépatite virale B ou C (Tab. 1), des facteurs de prédisposition à la stéatose hépatique alcoolique ou non alcoolique (obésité, syndrome métabolique, notamment en cas de diabète) ou des antécédents familiaux positifs (hépatite B, hémochromatose, maladies auto-immunes), les transaminases doivent être déterminées même en l’absence de symptômes. Cependant, il est important de savoir que chez environ 20% des patients atteints de stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD/NASH) et chez jusqu’à 40% des patients atteints d’hépatite chronique C ou B, les transaminases peuvent se situer dans la fourchette normale en dépit d’une fibrose hépatique importante. Par conséquent, s’il y a une suspicion raisonnable, il est nécessaire d’au moins effectuer un examen échographique et les sérologies correspondantes (anti-VHC, antigène HBs, IgG/M anti-HBc). Le fait d’avoir immigré de régions du monde où la prévalence de l’hépatite B est élevée, comme l’Asie, l’Afrique ou l’Europe du Sud-Est, justifie en soi une sérologie de l’hépatite B.
Une sérologie de l’hépatite C avec des transaminases normales est également justifiée chez les personnes nées entre 1950 et 1980, quelle que soit leur origine. Au cours de ces décennies, les infections résultant de la prise de médicaments, de l’utilisation de drogues par voie intraveineuse ou de transfusions sont passées inaperçues. Le virus de l’hépatite C n’est détectable que depuis le début des années 1990.
Interprétation de valeurs hépatiques élevées
Le profil enzymatique, le niveau d’élévation des valeurs hépatiques et le contexte clinique fournissent des informations précieuses pour l’interprétation et une investigation plus poussée.
Profil enzymatique
Hépatique: en cas de dommage hépatocellulaire, les valeurs ALT et AST sont élevées à titre principal; les paramètres de cholestase peuvent être normaux ou légèrement à modérément réactifs. Un rapport AST/ALT >2 suggère une atteinte hépatique éthylotoxique (quotient de De Ritis). Si ALT>AST, cela peut indiquer une NAFLD/NASH ou une hépatite virale.
Cholestatique: en principe, les paramètres cholestatiques PA, GGT et bilirubine sont plus élevés que l’ALT et l’AST dans les hépatopathies cholestatiques. En cas d’obstruction aiguë des voies biliaires, les transaminases et la bilirubine réagissent généralement en premier en raison de leur cinétique plus rapide, et les autres paramètres de cholestase (PA, GGT) n’augmentent qu’au cours de l’évolution.
Niveau de l’élévation enzymatique
Léger à modéré (>2 fois à max. 10 fois plus élevé): dans cette fourchette, on trouve des élévations enzymatiques dans le cadre de la plupart des hépatopathies chroniques (hépatite virale chronique B ou C, NASH/NAFLD, hépatopathies héréditaires). L’hépatite éthylotoxique n’est pas non plus classiquement associée à des élévations importantes des valeurs hépatiques. La plupart des élévations des transaminases ou des paramètres de cholestase induites par des médicaments se situent également dans cette fourchette. Dans le cas d’une cirrhose du foie, les enzymes hépatiques se situent souvent même dans la plage normale ou ne sont que légèrement élevées en raison de la destruction de nombreux hépatocytes qui s’est déjà produite.
Élevé (>10 à 20 fois plus élevé): dans ce cas, une nécrose hépatique aiguë est généralement présente. Les causes les plus fréquentes sont une ischémie (choc, cardiogénique), une hépatite virale aiguë ou une obstruction biliaire aiguë. Les intoxications sévères (p.ex. champignons) ou une hépatite auto-immune aiguë sont moins fréquentes.
Anamnèse et contexte clinique
Une anamnèse approfondie est souvent la clé du diagnostic correct et permet d’éviter des investigations inutiles. Il doit comprendre les points suivants (Tab. 2):
Algorithme d’investigation en 3 étapes
La procédure suivante, étape par étape, est recommandée à titre de guide d’orientation en cas d’élévation des valeurs hépatiques légère à modérée.
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Répéter les tests après 4 semaines: l’élévation des transaminases n’est que passagère (p.ex. médicaments, alcool, réaction concomitante à une infection virale banale)?
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Recherche d’hépatopathies fréquentes au moyen d’examens de laboratoire et de l’échographie:
Hépatite virale: Ag HBs, IgM/IgG anti-HBc et anti-VHC; en cas de détection d’Ag HBs, toujours rechercher également les anticorps de l’hépatite D; chez les patients immunodéprimés, rechercher également l’ARN de l’hépatite E
NAFLD/NASH: intolérance au glucose, dyslipidémie, signes échographiques de stéatose hépatique?
Hémochromatose: ferritine, saturation de la transferrine
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Échographie: signes de cirrhose, taille de la rate indiquant une hypertension portale, dilatation des voies biliaires, néoplasie?
Rechercher des causes rares, en procédant en fonction du contexte clinique:
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Hépatite auto-immune: initialement IgG, si élevé: ANA, anticorps (Ac) anti-muscle lisse, anti-LKM-1
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Cholangite biliaire primaire (en cas d’élévation des enzymes cholestatiques): AMA, anti-M2, le cas échéant biopsie du foie
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Cholangite sclérosante primaire (en cas d’élévation des enzymes cholestatiques, de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin): p-ANCA, CPRM/CPRE si nécessaire
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Maladie de Wilson (chez les patients <40 ans, symptômes neurologiques): céruloplasmine
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Déficit en alpha-1-antitrypsine (emphysème précoce): alpha-1-antitrypsine
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Maladie cœliaque (symptômes digestifs): IgA, Ac anti-transglutaminase, Ac anti-endomysium, le cas échéant œsophagogastroduodénoscopie avec biopsies duodénales
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Dysfonctionnement thyroïdien: TSH, T3, T4
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L’hépatite A est toujours envisagée, l’hépatite E presque uniquement en cas d’hépatite aiguë.
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Après les trois étapes de clarification, il reste les trois diagnostics d’exclusion fréquents:
Les lésions hépatiques d’origine médicamenteuse («drug-induced liver injury», DILI) présentent des modifications non spécifiques des valeurs hépatiques. Plus de 1000 médicaments ou toxines peuvent provoquer de telles élévations. Les médicaments typiquement utilisés dans la pratique clinique quotidienne sont les AINS, le marcoumar, l’isoniazide (INH), l’amoxicilline/acide clavulanique, l’amiodarone. En règle générale, la classe de substances doit être modifiée dans le cas d’une médication chronique, tandis que l’indication clinique du traitement médicamenteux, le moment de l’effet secondaire et le degré de sévérité de l’atteinte hépatique sont décisifs dans le cas d’une médication passagère. Grosso modo, si l’effet secondaire est aigu et sévère (ALT >5 fois supérieure et/ou PA >2 fois supérieure et/ou bilirubine >2 fois supérieure) ou si l’INR augmente, les médicaments doivent être interrompus.
Les hépatopathies liées à l’alcool peuvent être suspectées sur la base des antécédents et du profil enzymatique (p.ex. AST>ALT) mais ne sont jamais diagnostiquées sans exclure d’autres causes. L’hépatopathie alcoolique est souvent associée à d’autres hépatopathies, en particulier les hépatopathies virales.
La stéatose hépatique est également un diagnostic d’exclusion courant, qui ne diffère de l’hépatopathie alcoolique que par les antécédents et les facteurs de risque. Les résultats échographiques de la stéatose hépatique ne sont pas spécifiques quant à l’étiologie des graisses dans le foie. La biopsie du foie ne permet pas de distinguer la stéatose hépatique d’origine alcoolique ou métabolique en termes de cause, mais renseigne sur le pronostic. La stéatose hépatique sans inflammation est associée à un bon pronostic, alors que l’hépatite grasse alcoolique (ASH) ou hépatite non alcoolique (NASH) peut évoluer vers une cirrhose.
Tab. 2: Anamnèse de l’élévation des valeurs hépatiques
Interprétation des valeurs de ferritine et des transaminases
La ferritine est une protéine de phase aiguë et dépend de nombreux facteurs. Une élévation n’est pas seulement le reflet de réserves de fer trop remplies. Toute élévation des transaminases peut faire croître ce paramètre inflammatoire. La saturation de la transferrine mesurée à jeun est utile. Tant que ce taux est <50%, il n’y a pas de maladie du stockage du fer au sens de l’hémochromatose HFE, et la ferritine n’est pas utile pour évaluer l’hépatopathie ou en termes de traitement.
Le diagnostic de la cirrhose du foie ne se base pas sur les transaminases!
Les cirrhoses du foie au stade décompensé sont faciles à diagnostiquer, avec un petit foie rétréci à l’imagerie, une grosse rate reflétant une hypertension portale et en association avec une ascite. Cependant, il est crucial de détecter les cirrhoses du foie au stade Child A précoce. Ce qui exige davantage d’attention. À ce stade, les maladies qui en découlent peuvent encore être influencées. Le stade de la cirrhose doit être recherché au moindre signe d’hépatopathie. En laboratoire, les symptômes les plus certains de cirrhose sont une numération plaquettaire normale basse ou diminuée, une taille de la rate supérieure à la normale et des signes échographiques souvent discrets et non spécifiques avec des augmentations de l’échostructure du foie et des irrégularités, des modifications discrètes de la surface du foie, des irrégularités des veines hépatiques et de la veine porte, et généralement un lobe caudé proportionnellement élargi. Tous ces signes apparaissent bien avant l’ascite et d’autres signes de décompensation hépatique. L’élévation des transaminases n’indique pas la présence d’une cirrhose. Les transaminases peuvent également être normales. Dans toute cirrhose, les causes traitables possibles telles que l’hépatite virale, les maladies auto-immunes et les maladies de stockage doivent être investiguées. C’est également le cas si des paramètres d’une hépatopathie métaboliquement toxique sont présents, comme la consommation d’alcool ou l’obésité, le diabète. En effet, les causes combinées de cirrhose sont fréquentes!
Un facteur simple et donc important pour diagnostiquer une cirrhose tôt est la mesure non invasive de l’élasticité échographique par FibroScan. Une fois le diagnostic posé, en vue de la localisation, la recherche de varices œsophagiennes par gastroscopie et la surveillance échographique du foie tous les six mois sont nécessaires pour détecter précocement un carcinome hépatocellulaire (CHC) et des signes de décompensation. Une très bonne vue d’ensemble des options thérapeutiques actuelles en cas de détection d’un CHC est décrite dans l’«Expert Opinion Statement» des hépatologues suisses publié en 2021 (SASL.ch/practice guidelines: https://sasl.unibas.ch/6SASLguidelines.php ).
Quand faut-il diriger vers un spécialiste?
Dans les situations suivantes, il convient d’envisager de diriger le patient vers un spécialiste:
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Si le diagnostic n’est pas clair, pour d’autres examens spécifiques, notamment une biopsie du foie
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Pour évaluer le stade de l’hépatopathie (degré de fibrose, activité inflammatoire) et donc pour estimer le pronostic au moyen d’un FibroScan (méthode d’échographie non invasive permettant de déterminer le degré de fibrose) ou d’une biopsie du foie
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Si un traitement compliqué est prévu (p.ex. en cas d’hépatite C chronique avec cirrhose ou hépatite B, hépatite auto-immune)
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En cas d’hépatopathies d’origine génétique (hémochromatose, maladie de Wilson, déficit en alpha-1-antitrypsine) pour le traitement et pour le conseil génétique
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En cas d’élévation soudaine et sévère des valeurs hépatiques (>10 à 20 fois) et de suspicion d’insuffisance hépatique aiguë (hausse rapide de la valeur INR dans l’espace de quelques heures/jours), l’hospitalisation est indiquée.
Plus d’informations:
Site Web des hépatologues suisses: www.sasl.ch