Néoplasies myéloprolifératives (NMP)

Maladie de Vaquez: la saignée est dépassée?

Dans le traitement de la maladie de Vaquez (MV), la saignée continue d’être une option thérapeutique de première ligne, mais elle entraîne à long terme une carence en fer. Les nouvelles thérapies comme l’inhibition des JAK1/2 avec le ruxolitinib ou le ropeginterféron alfa-2b constituent une avancée majeure dans le traitement à long terme de la MV, car elles permettent de réduire en continu la charge allélique et de prolonger la survie sans événement.

Depuis la première description de la maladie de Vaquez (MV) en 1892, la saignée est traditionnellement utilisée comme option thérapeutique. Aujourd’hui encore, la saignée est utilisée comme traitement de première ligne relativement rapide chez la majorité des patient·es atteint·es de MV récemment diagnostiquée dans le but de prévenir les complications aiguës comme l’infarctus du myocarde ou l’accident vasculaire cérébral. Les saignées répétées permettent de maintenir l’hématocrite en dessous de la valeur cible définie de 45% chez une partie des patient·es, sans toutefois intervenir dans la pathophysiologie complexe de la maladie. Les symptômes de carence en fer qui s’installent constituent un inconvénient de la thérapie par saignée à long terme.

Réponse moléculaire et EFS prolongée avec l’inhibition des JAK

La mutation V617F de JAK2, décrite pour la première fois en 2005 dans les néoplasies myéloprolifératives (NMP), est détectable chez plus de 95% des patient·es atteint·es de MV et entraîne une activation constitutionnelle de la voie de signalisation JAK-STAT et une hyperprolifération hématopoïétique.1 Les objectifs du traitement sont, outre la prévention des complications thromboemboliques, l’amélioration de la qualité de vie et surtout une modification de l’évolution de la maladie.

Le ruxolitinib, un inhibiteur de JAK1/2, a été comparé à la BAT («best available therapy») dans la maladie de Vaquez dans le cadre des études randomisées de phaseII MAJIC-PV2 et de phaseIIIb RESPONSE-2.3,19 Le ruxolitinib entraîne un contrôle hématologique amélioré et durable (RC selon les critères ELN4), une maîtrise efficace des symptômes et une amélioration de la qualité de vie. Par rapport à la BAT, seule la moitié environ des patient·es du bras ruxolitinib ont eu besoin d’au moins une saignée supplémentaire pour contrôler leur hématocrite (objectif ≤45%).2

Lors du suivi à 5ans de l’étudeMAJIC-PV, en 2023, il a été démontré que la survie sans événement (EFS) était significativement prolongée avec le ruxolitinib. De plus, une réponse moléculaire est obtenue: diminution de la charge allélique JAK2 («variant allele frequency», VAF) dans le sang périphérique. Le délai médian avant l’obtention d’une réponse moléculaire avec le ruxolitinib était de 36mois versus non atteint dans le bras BAT.2

Le ropeginterféron alfa-2b réduit en continu la charge allélique

Le ropeginterféron alfa-2b est autorisé dans l’UE pour le traitement de première ligne de la MV depuis 2019. L’interféron (IFN) agit également par la voie de signalisation JAK-STAT et entraîne une diminution continue du fardeau allélique JAK2-V617F dans le traitement à long terme.7,8 Dans les études PROUD-PV et CONTINUATION-PV, l’IFN a été comparé à l’hydroxyurée (HU) pendant la première année de traitement et aux BAT (dont 88% de HU persistantes) à partir de la deuxième année. La réponse au ropeginterféron alfa-2b s’améliore continuellement avec la durée du traitement, avec une bonne tolérance des administrations sous-cutanées toutes les deux semaines.5,9 Dans l’évaluation finale des six années de suivi, non seulement la proportion de patient·es en rémission hématologique complète (RHC) durable était significativement plus élevée dans le bras interféron (72,6% vs 52,6%, p=0,004), mais l’EFS (thromboembolies, progression de la maladie ou décès) et la réponse moléculaire (69,1% vs 21,6%, p<0,0001) étaient également supérieures à celles obtenues avec les BAT.5,10 Environ la moitié des patient·es (50 sur 92) ont présenté une réduction de la charge allélique à <10% et 14 patient·es sur 92 présentaient une charge allélique <1% après 72mois de traitement par ropeginterféron alfa-2b.10

La diminution de la charge allélique de JAK2-V617F sert de marqueur de substitution pour la modification de la maladie, bien qu’il manque jusqu’à présent d’études prospectives évaluant dans quelle mesure une diminution de la charge allélique de JAK2 prévient la progression vers la myélofibrose ou un SMD/une LMA. En ce qui concerne la progression de la maladie, il convient de noter que chez plus de 50% des patient·es atteint·es de MV, des lésions sous-clonales non pilotes sont déjà détectables au moment du diagnostic, comme TET2 (sans signification pronostique), ASXL1 et LNK. Au cours de l’évolution, d’autres mutations typiques du SMD/de la LMA peuvent s’ajouter, comme les mutations SRSF2, RUNX1, TP53 ou IDH. Celles-ci sont prises en compte, en plus de l’âge, du nombre élevé de leucocytes et du caryotype anormal, dans le score MIPPS-PV («mutation-enhanced international prognostic score»). Les groupes de risques résultants «low», «intermediate-1», «intermediate-2» et «high» divisent la probabilité de survie en un spectre allant d’une médiane de 5,4ans pour le groupe à haut risque à une médiane de 25,3ans pour le groupe à bas risque.20

Trouver le traitement individuel optimal

Le défi consiste à mettre en place une thérapie sur mesure. Les symptômes souvent pénibles de la MV sont le prurit, les symptômes constitutionnels comme une fatigue prononcée, les troubles de la microcirculation (p.ex. érythromélalgie) et la survenue d’événements thromboemboliques malgré le traitement par AAS et la baisse de l’hématocrite en dessous de 45% conformément aux recommandations des lignes directrices. La classification classique en MV à faible risque et MV à haut risque se réfère à la probabilité de thromboembolies et ne comprend que deux facteurs: l’âge ≥60ans et la présence d’antécédents d’événements thromboemboliques. D’autres facteurs de thrombose et de progression de la maladie sont la leucocytose et une charge allélique JAK2-V617F élevée, mais ils n’entrent pas dans la classification des risques.16,17

Les saignées seules, associées à l’AAS ou à l’ajout d’hydroxyurée, ne permettent pas de contrôler de manière satisfaisante la charge symptomatique ni d’éviter les complications thromboemboliques à long terme. C’est pourquoi l’utilisation précoce de traitements modificateurs de la maladie, comme le ropeginterféron ou le ruxolitinib, fait l’objet d’une attention particulière.

Le ruxolitinib est autorisé en deuxième ligne depuis 2014 en cas de résistance ou d’intolérance à l’hydroxycarbamide.14 Cette substance est particulièrement adaptée au contrôle des symptômes et à la réduction de la taille de la rate.

Le ropeginterféron est autorisé en monothérapie dans la MV sans splénomégalie symptomatique, indépendamment du traitement antérieur ou de la présence de facteurs de risque d’événements thromboemboliques.15 L’utilisation du ropeginterféron est recommandée aussi bien chez les patient·es à haut risque que chez les patient·es à faible risque.11-13

Dans le registre espagnol de la maladie de Vaquez, 453patient·es à faible risque traité·es initialement uniquement par saignées et AAS ont été suivis pendant dix ans (2011–2021). Un contrôle durable de l’hématocrite n’a pu être obtenu que chez un tiers des patient·es et aucun contrôle satisfaisant des symptômes n’a été obtenu au cours de l’évolution. Les événements thrombotiques sont survenus à une fréquence de 0,8% par an (probabilité attendue de 8,5% sur dix ans). Une tendance à un risque supérieur de thrombose veineuse a été observée en cas de charge allélique JAK2 élevée.18 Sur la base de l’étude «Low PV», une étude randomisée de phaseII comparant le ropeginterféron alfa-2b et la phlébotomie, le ropeginterféron a également été approuvé pour le traitement de la MV à faible risque, avec pour objectif la modification précoce de la maladie.6,21

Le rôle de la saignée a évolué

Un problème de la thérapie par saignée seule en association avec l’AAS est également la valeur d’hématocrite fluctuante dans l’analyse longitudinale, car la saignée ne «coupe» toujours que ponctuellement la surcharge érythrocytaire. Cela ne permet pas d’obtenir une réponse hématologique continue. Dans une analyse rétrospective de données en situation réelle portant sur 28306patient·es atteint·es de MV (2011-2019), les patient·es du groupe à faible risque et du groupe à haut risque sous monothérapie par saignées ont présenté un contrôle suboptimal de l’hématocrite (défini comme Hk >50% parfois ou toujours). Cela concernait 54% des patient·es du groupe à haut risque et 64% du groupe à faible risque.22 Outre cette prise en charge insatisfaisante en termes de prévention des complications vasculaires et de réduction des symptômes spécifiques à la maladie, la prévention de la progression de la maladie n’est pas abordée dans la perspective à long terme.

Le rôle de la saignée a donc fondamentalement changé et réside dans la réduction initiale de l’hématocrite afin de prévenir les complications vasculaires aiguës. Pour le contrôle à long terme de la maladie, l’instauration précoce d’un traitement cytoréducteur est indiquée, avec une préférence pour le ropeginterféron alfa-2b.11,12

◾30

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© Klinikum Chemnitz

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© Novartis

Le comité directeur du Groupe Suisse de Recherche Clinique sur le Cancer (SAKK) a élu Vincent Gruntz au poste de CEO. L’économiste, qui dispose d’une vaste expérience dans le domaine de la santé et dans le secteur pharmaceutique, succèdera au Dr Hans Rudolf Keller, qui quitte la SAKK.

Après deux ans et demi en tant que CEO, Dr Hans Rudolf Keller a décidé de quitter la SAKK. Il a défini avec succès les objectifs et la stratégie des années à venir, élaborant par là même des structures et des processus efficaces, ainsi qu’une direction d’entreprise responsable.

Le Comité a choisi son successeur et a élu Vincent Gruntz nouveau CEO du SAKK. Cet économiste de formation (lic. rer. pol.) a occupé diverses fonctions dirigeantes dans la branche pharmaceutique et a travaillé pendant quelques années en tant qu’économiste à la division Assurance maladie et accident de l’Office fédéral de la santé publique. Il était dernièrement responsable de l’ensemble du portefeuille de thérapie cellulaire chez Novartis en tant que vice-président et International Head of Cell and Gene Therapies. Il prendra ses fonctions au SAKK en septembre 2024. Il dispose d’un large réseau dans le système de santé suisse. Vincent Gruntz a déclaré lors de sa nomination: «J’ai appris à connaître et à apprécier le SAKK lorsque j’étais General Manager de Novartis Oncologie en Suisse. Selon moi, le SAKK occupe une position unique pour placer la Suisse à la pointe de la recherche clinique sur le cancer, ainsi que dans des thèmes comme la qualité des données, la numérisation et l’innovation dans le domaine de la recherche sur le cancer. Je serai très heureux d’écrire le prochain chapitre de la success-story du SAKK aux côtés de toute l’équipe.» (red)

Source:

Communiqué de presse du SAKK, 31/05/2024

jusqu’à ¼ des patient·es

Myélofibrose post-MV

env. 10–15% des patient·es

transformation leucémique: SMD/LMA

env. 5–8% des patient·es

médiane de 15ans

Pose du diagnostic

Phase de polycythémie chronique

Phase tardive

Temps en années

Fig.1:Risque de progression dans la MV

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