Pré-BPCO, PRISm, EABPCO
Concepts actuels concernant la BPCO
La BPCO est un problème mondial dont l’hétérogénéité fait désormais l’objet d’une attention croissante. La recherche de biomarqueurs permettant un diagnostic plus précoce et le développement de nouveaux concepts thérapeutiques plus personnalisés détermineront les prochaines années de recherche. Actuellement, on essaie de sensibiliser davantage aux stades et au diagnostic précoces de la maladie grâce à une nouvelle nomenclature.
Une crise sanitaire mondiale
La prévalence des maladies respiratoires chroniques – et donc de la BPCO, leur manifestation la plus fréquente – augmente depuis des années. À l’échelle mondiale, la BPCO s’est hissée au troisième rang des causes de mortalité les plus fréquentes,1 dont 90% des cas sont enregistrés dans les pays à revenu faible ou intermédiaire (PRFI).2
Outre le principal facteur de risque que constitue la fumée de cigarette, l’exposition à des polluants environnementaux joue un rôle, surtout dans les PRFI, y compris, dans une proportion importante, dans les ménages, à cause de systèmes de chauffage insuffisants.1,2
Bien que le lien avec le tabagisme soit connu depuis des décennies, il apparaît également que tous les fumeurs ne développent pas une BPCO et, inversement, que tous les malades n’ont pas d’antécédents pertinents de tabagisme. L’un des facteurs de ce phénomène semble être le fait que de nombreuses personnes n’atteignent jamais complètement le maximum de leur capacité pulmonaire, que ce soit en raison de la génétique, de facteurs prénataux (qui entraînent une naissance prématurée et un faible poids à la naissance), d’infections récurrentes pendant l’enfance et l’adolescence ou de la pollution environnementale déjà mentionnée.3 En comparaison, les personnes atteintes de BPCO qui n’ont jamais fumé présentent des symptômes plus légers ainsi qu’une faible limitation du débit respiratoire, et souffrent moins d’emphysème et moins souvent de comorbidités.3
Pathogenèse
Il est évident que la BPCO se développe lorsqu’une personne présentant une prédisposition génétique est en contact avec une ou plusieurs substances nocives. Cette prédisposition génétique est polygénique et n’a pas encore été étudiée dans son intégralité. Le déficit en alpha-1-antitrypsine (AAT), qu’on peut localiser sur le chromosome 14, constitue une exception. Dans ce cas, un traitement de substitution peut être proposé pour ralentir la diminution du VEMS.
La combinaison de destruction et de remodelage des voies respiratoires ainsi que du parenchyme entraîne les symptômes typiques suivants: dyspnée, toux productive, limitation des mouvements et décès prématuré.
Pour tenir compte du fait que différents facteurs peuvent conduire au développement d’une BPCO, une nouvelle classification en cinq groupes a été récemment proposée: BPCO due à des facteurs génétiques, des «early-life events», des infections, la fumée du tabac et des produits de vapotage, et des facteurs environnementaux.1
Diagnostic
Dans un contexte donné (tableau clinique correspondant, substances nocives, génétique), une obstruction partiellement réversible révélée à la spirométrie confirme le diagnostic de BPCO.2 Il faut toujours garder à l’esprit que cette limitation du débit respiratoire constitue très probablement l’expression d’une atteinte permanente.1
L’obstruction est définie comme un rapport VEMS/CVF <0,7 (ou inférieur à la «lower limit of normal») après bronchodilatation.2 Le rapport GOLD 2023 maintient le rapport défini,2 ce qui est probablement dû au fait que les critères plus récents de la «Global Lung Initiative» (GLI) ne sont pas disponibles dans tous les laboratoires de spirométrie. La première approche conduit à une tendance au surdiagnostic de la BPCO avec l’âge, aspect qui devrait être pris en compte dans l’évaluation.4 La définition purement spirométrique de la maladie présente l’avantage évident de la simplicité. L’inconvénient, tout aussi évident, est une détection insuffisante des stades précoces.
Stades préliminaires de la maladie – un nouveau concept fait son apparition
Le concept de «pré-BPCO» est né de ce dilemme diagnostique. Il décrit la présence de symptômes respiratoires ou d’anomalies structurelles (p.ex. emphysème) associées à des paramètres ventilatoires normaux.2,5,6
Le terme «preserved ratio impaired spirometry» (PRISm) désigne une spirométrie anormale associée toutefois à un rapport VEMS/CVF (encore) préservé.6,7 La pré-BPCO et le PRISm sont tous deux des stades préliminaires potentiels de la BPCO.
La population à risque, définie d’un point de vue global à partir du tableau clinique, de l’imagerie et de la fonction pulmonaire, se voit ainsi attribuer un nom et fait l’objet d’une sensibilisation correspondante qui doit conduire à un suivi plus étroit.5 Outre la prévention de la maladie, un autre objectif important doit être de poser le diagnostic à un stade précoce et donc de prévenir le déclin de la fonction pulmonaire (Fig.1). Il est toutefois certain que d’autres recherches sont nécessaires pour identifier les options thérapeutiques au-delà de l’arrêt de la nicotine.
Classification
La classification GOLD utilisée dans le monde entier utilise un concept multimodal. La classification de la maladie se fait d’abord dans les groupes 1 à 4 en fonction de la diminution du VEMS (Fig.2).
Une modification récente a été apportée aux classes de risque, qui fournissent des informations sur les symptômes et le risque de nouvelles exacerbations ou de nouvelle hospitalisation (Fig.2). Des questionnaires (Modified British Medical Research Council [mMRC] ou COPD Assessment Test [CAT]) ainsi que les antécédents individuels sont utilisés pour l’évaluation:2
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Le groupe A décrit les patient·es peu symptomatiques présentant un risque faible de nouvelles exacerbations: mMRC 0–1 ou CAT <10 et jusqu’à 1 hospitalisation/an.
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Le groupe B décrit des symptômes plus sévères: mMRC ≥2 ou CAT ≥10.
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Le groupe E décrit les patient·es présentant un risque élevé de nouvelles exacerbations: ≥2 exacerbations/an ou ≥1 hospitalisation pour exacerbation.
Traitement
Les préparations à courte durée d’action («short-acting muscarinic antagonists» [SAMA]ou «short-acting beta-agonists» [SABA]) jouent un rôle dans les stades précoces, lorsque la dyspnée est seulement occasionnelle, et doivent être prescrites pour soulager les symptômes (traitement de secours) sous traitement à longue durée d’action déjà établi.2 Le traitement dépend de la classe de risque:2
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Les patient·es du groupe A doivent recevoir un bronchodilatateur, de préférence à longue durée d’action.
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À partir du groupe B, le traitement doit être une combinaison de LAMA et de LABA.8
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Dans le groupe E, cette combinaison est également supérieure aux monothérapies. L’utilisation de LABA + CSI n’est plus recommandée.
L’intervention la plus importante reste l’arrêt du tabac. Il entraîne une amélioration des taux de mortalité et de morbidité, même après une limitation du débit respiratoire déjà diagnostiquée.9 Il conduit également à une réduction du taux d’exacerbations.10
Les traitements de soutien comprennent les inhibiteurs de la PDE-4 pour réduire le taux d’exacerbations,11 ainsi que la N-acétylcystéine à une dose suffisamment élevée (>1800mg/j).12 Aux stades avancés, les opioïdes sont utilisés pour réduire la charge symptomatique.13 Un traitement continu par les macrolides est moins courant, ces derniers réduisant le taux d’exacerbations, mais augmentant la toxicité et favorisant le développement de résistances.14
Le statut vaccinal concernant la grippe, les pneumocoques ainsi que le SARS-CoV-2 doit être régulièrement contrôlé et mis à jour.2
L’oxygénothérapie de longue durée doit être mise en place chez les patient·es stables présentant une hypoxémie importante (pO2 ≤55mmHg deux fois en trois semaines). Une réévaluation est recommandée 60 à 90 jours plus tard.2
Exacerbations
En ce qui concerne les exacerbations aiguës (EABPCO), une classification en quelque sorte rétrospective était appliquée jusqu’à présent après la mise en place du traitement. Il en résulte notamment une comparabilité fortement limitée en raison des différences mondiales et parfois nationales des systèmes de santé ainsi que de leurs ressources. La «Rome Proposal»15 propose actuellement des paramètres objectivables: dyspnée, SpO2, fréquence respiratoire, fréquence cardiaque, CRP sérique, gazométrie artérielle. La classification se fait ensuite en EABPCO légère, modérée et sévère (Fig. 3).◼
◾07
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K. Kutics, Wels© Klinikum Wels-Grieskirchen
«disease interception»Gestion des symptômes20 30 40 50 60 70 80
Âge (ans)
Diagnostic de BPCOFonction pulmonaireSymptômesB
A
Fonction pulmonaireDiagnostic de BPCOAufnahme in RCTGestion des symptômesFig. 1: Importance d’un diagnostic précoce (modifié selon Stolz et al., 2022)1A: Actuellement, la BPCO est diagnostiquée à un stade où les modifications pathologiques sont irréversibles. Ce diagnostic tardif est dû à une combinaison de facteurs, dont l’absence de biomarqueurs prédictifs, des symptômes cliniques sous-diagnostiqués, une durée prolongée de la maladie sans symptôme ou associée à des symptômes minimes, et la confiance accordée à la spirométrie, qui est un outil de diagnostic peu sensible. B: La mise en œuvre d’un diagnostic plus complet de la BPCO permet une détection précoce, avant la survenue de toute modification pathologique irréversible, et favorise la «disease interception» (prévention de l’évolution de la maladie).
Fig. 2: Classification ABE de GOLD (modifiée selon Agustí et al., 2023)2
Envisager les diagnostics différentiels possibles
• Insuffisance cardiaque
• Pneumonie
• Embolie pulmonaire
Tests et traitement appropriés
Détermination de l’étiologie (examens complémentaires, tels que tests virologiques, test salivaire à la recherche de bactéries ou autres)CRP; protéine C-réactive; EVA: échelle visuelle analogique; FC: fréquence cardiaque; FR: fréquence respiratoire; GZ: gazométrie artérielle; PaCO2: pression partielle du dioxyde de carbone dans le sang artériel; SaO2: saturation artérielle en oxygène
Fig. 3: Approche diagnostique en cas de suspicion d’exacerbation aiguë (modifié selon Celli et al., 2021)15